On a testé la cueillette de plantes sauvages avec Christophe de Hody
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Sommaire
Qu'est-ce que la cueillette de plantes sauvages ?
Nous retrouvons Christophe de Hody un mardi de mars au Jardin Villemin, au bord du Canal Saint Martin. Christophe est là, sourire bienveillant, les pieds bien ancrés dans le sol. Il accueille la dizaine de personnes qui s’est inscrite à sa cueillette urbaine. Tous partagent la même envie de se reconnecter au vert et de comprendre la nature qui les entoure.
Christophe de Hody est le fondateur du Chemin de la Nature. Son pari ? nous convertir à la cueillette sauvage. Il organise, avec son équipe, des sorties à la découverte des plantes médicinales et comestibles de Paris et de sa banlieue, ainsi que des formations en ligne pour herboristes en herbe. Un succès fou qui ne se dément pas !
Avant d’entamer la balade, Christophe plante le décor : le désintérêt progressif pour la cueillette à partir des années 1950, la chute des insectes volants de 75% en trente ans... Regard vers le sol. Il se baisse et cueille une tige. Ce que l’on prenait pour une fleur banale se révèle être un lamier pourpre au goût de champignon qui se cuisine en velouté. Autour de nous, on prend des notes, on lève le doigt. C’est l’école au vert. On découvre comment reconnaître le groupe des laitues et des pissenlits au latex végétal qui coule dans la plante ou comment préparer une huile raffermissante avec des pâquerettes...
Krème. Bonjour Christophe ! Tes sorties cueillettes urbaines de plantes sauvages rencontrent un engouement sans précédent. Comment l’expliques-tu ?
Christophe de Hody : "Après la guerre, en France, la population a boudé les plantes sauvages et la cueillette. C’était le temps de l’ultra-croissance où il fallait nourrir une population qui ne cessait de croître. La plante sauvage est devenue la “mauvaise herbe”, l’ennemie de la culture, que l’on devait éradiquer.
La médecine moderne a pris la place des plantes. Pour couronner le tout, en 1941, le diplôme d’Etat d’herboriste a été supprimé. Avec la perte de la transmission orale dans les villages s’est perdue une immense connaissance liée aux plantes. S’y ajoute l’oubli dans les programmes scolaires. Et puis, dans les années 1970-1980, certains groupes en marge commencent à reconnecter avec cela. Plus récemment, depuis 10 ans, l’engouement est là et, depuis trois à quatre ans, c’est en plein boom."
Comment peut-on s'initier à la cueillette ?
Qui sont les personnes qui participent à tes cueillettes de plantes sauvages ?
C.H. "Les gens qui m’accompagnent le font surtout par envie d’apprendre des choses qui ont du sens et de se reconnecter à la nature. Face à cette société de consommation, ils veulent compenser à l’inverse, comme une envie incontrôlable de respirer. Or, quand on ne connaît pas ce qui nous entoure, la nature peut paraître impressionnante, étrangère. Notre mission, avec Le Chemin de La Nature, c’est de leur apprendre toutes les bases pour qu’ils puissent se la réapproprier."
Comment peut-on débuter la pratique de la cueillette sauvage ?
C.H. "D’abord, allez dans les parcs, les forêts. Essayez de vous poser et d’écouter ce que vous ressentez. Constatez que lorsque vous regardez au loin, cela vous fait du bien. Levez la tête, baissez la tête. Essayez d’observer les changements opérés par les saisons : les bourgeons, les fleurs, les fruits… Dans un premier temps, peu importe la connaissance, observez. L’étape d’après, c’est de participer à des sorties comme celles que l’on propose, ou bien de se mettre à la randonnée."
Comment t'es-tu initié personnellement à la cueillette ?
C.H. "Ma mère était institutrice et pratiquait le yoga. Mon père avait une ferme et cultivait son potager. Je suis un peu tombé dedans petit. Ils m’ont transmis l’envie de se faire du bien et le besoin de liberté. Je n’ai jamais connu les injonctions du type « tu ne vas pas plus loin que la barrière… », « tu restes à côté de nous ». J’étais libre et, pour moi, la nature était la source d’une joie immense. Je construisais des cabanes, je cueillais des champignons… et des plantes sauvages. En grandissant, j’ai cherché une voie avec un impact positif. Une voie qui me permettrait de cultiver ce bonheur épicurien. J’ai débuté avec des balades sauvages sur participation libre, puis nous avons publié des formations en ligne qui ont rencontré un succès fou."
" Quand on débute la cueillette, la nature peut sembler impressionnante, étrangère. À nous de l'apprivoiser ! "
Quelles plantes cueillir pour leurs bienfaits ?
Peux-tu nous citer quelques plantes à repérer pour leurs vertus ?
C.H. "La liste est interminable, c'est un long apprentissage. Parmi les plus connues, je peux citer le thym, l'ortie, le romarin, le souci des champs, l'achillée millefeuille..."
Peux-tu nous parler d’une plante qui t’impressionne ?
C.H. "Sans hésiter, l’ortie. Elle est simple à reconnaître et juste extraordinaire. Crue, elle est très savoureuse. Cuite, elle a un goût d’épinard. On en fait des jus (jus de pomme, ortie, citron vert, glaçons) ou des cocktails. Elle est extrêmement nutritive : elle contient tous les minéraux essentiels : vitamines B, C, E, provitamine A, magnesium, calcium, fer et silicium, ainsi que des protéines (40% de son poids sec) de même qualité que des protéines animales et 8 acides aminés essentiels.
Elle contient aussi des molécules inflammatoires et diurétiques avec des propriétés pour soigner l’arthrose, les douleurs articulaires. Elle aide aussi à réparer les tissus, est anti anémiante, anti-allergique (contre le rhume des foins). Et on la trouve partout !"
Et pour la cosmétique ?
C.H. "En France, pour la cosmétique, le terrain de jeu est immense ! Commençons par les plantes aromatiques comme le thym ou le romarin, mais aussi beaucoup de plantes aux vertus anti-inflammatoires, apaisantes et cicatrisantes, comme le souci des champs (qui est un calendula), l'achillée millefeuille, la mauve. J'aime aussi citer la pâquerette, qu'on trouve partout, et avec laquelle on peut réaliser un excellent macérât tonifiant et raffermissant pour les jambes, le corps !"
Où pratiquer la cueillette sauvage ?
As-tu des sorties à conseiller autour de Paris ?
C.H. "Le bois de Vincennes et le bois de Boulogne. Sortez des sentiers les plus empruntés et partez à l’aventure ! Un peu plus loin, la forêt de Fontainebleau, la Vallée de Chevreuse ou la forêt de Rambouillet à partir du Perray-en-Yvelines (Transilien N). Et puis, pour se familiariser avec les plantes, l’Herboristerie du Palais Royal est un lieu magique."
Et pour ceux qui ne vivent pas à Paris ?
C.H. "Il y a tant d’endroits sublimes en France. Et surtout la flore est si diverse. Nous préparons des formations dédiées aux différentes flores : les montagnes, les bords de mers, les marais…"
Infos pratiques :
- Site du Chemin de la Nature à retrouver ici
- Balades sauvages : 20€ (12€ pour les enfants) pour 2h de promenade commentée
- Formation : la première formation sur 6 plantes connues est gratuite, puis 99€/mois pour la formation complète.